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Réseaux & territoires

Edito : Pas de révolution de l'offre grand âge sans moyens

Auteur Annie De Vivie

Temps de lecture 3 min

Date de publication 18/11/2020

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Professionnaliser et financer au long cours l’approche domiciliaire jusqu’au bout de la vie

Les professionnels de la gérontologie, les professionnels du domicile veulent "renverser la table".

Ils ne veulent plus de rapports, d'analyses.

Les constats sont partagés : le secteur est notoirement sous-doté pour faire face à la révolution de la longévité qui voit l'explosion actuelle et future des besoins des plus âgés fragilisés, des aidants et qui doit faire face aux crises sanitaires qui se succèdent.

Tous défendent la révolution de l'offre par la mise en oeuvre d'une vraie "approche domiciliaire" qui allie éthique, professionnalisme, gouvernance et financements de solutions d'intérêt général.

Une révolution de l'offre avec pour socle l'éthique, les valeurs, le sens du prendre soin : l'Espace Ethique Ile-de-France vous invite à participer à une enquête nationale, rapide et anonyme pour identifier les questionnements éthiques et les actions mises en oeuvre dans les établissements, résidences et unités pour personnes âgées.

Une révolution de l'offre impossible sans un grand professionnalisme, sans ces métiers du grand âge qui demandent savoir-être, savoir-faire, expertises. Les recommandations du rapport El Khomri vont peut-être enfin mises en musique par Michel Laforcade qui vient d'être missionné à cet effet. Gageons que l'ancien DG de l'ARS Nouvelle Aquitaine pourra apporter son énergie et son engagement pour l'amélioration continue de la qualité du prendre soin, la reconnaissance des acteurs de terrain soutenus, financés, évalués.

Si les futurs professionnels du grand âge mieux formés, plus outillés sont accueillis dans des services et établissements exsangues, épuisés, enchainant coûte que coûte les "tâches" auprès de personnes fragilisées qu'on ne voit plus... nul doute qu'ils feront demi-tour.

La révolution de l'offre commence dans chaque tête : que voulons-nous pour nos vieux jours ? Une vraie approche domiciliaire qui respecte ma singularité, ma dignité, mon intimité, malgré les fragilités, les pathologies ? Préserver les droits des citoyens quel que soit leur âge ? Quels financements mobilisés pour ces services au grand âge ?

La révolution de l'offre demande un partage du pouvoir sur nos conditions de fin de vie : dans des "maisons jusqu'au bout de la vie" ou dans des structures sanitaires. A nous de décider. Voir cette semaine cet équilibre subtil (à négocier avec les parties prenantes) pour maintenir les visites tout en respectant les gestes barrières au regard des contaminations.

La crise sanitaire révèle les attentes, les manques, les besoins. Les retraités et proches aidants confinés se projettent. Ils misent sur l'adaptation de leur logement pour vieillir chez eux en évitant au maximum les Ehpad dont les taux d’occupation sont en berne au point que les groupes privés font des promos sur le tarif hébergement.

La révolution de l'offre demande un mode de management de proximité, financé, qui soutient une démarche d'amélioration continue du prendre soin, de prévention santé, de qualité de vie au travail. Voir cette semaine l'approche basque "Goxoki grand âge" dont la roue de la qualité (roue de Deming) se déploie autour de pratiques opérationnelles traitées avec les personnes concernées elles-mêmes et leurs proches.

La révolution de l'offre du grand âge demande des collaborations territoriales identifiées, soutenues, financées, labellisées.

Pas de révolution de cette offre sans moyens ajustés (évalués sur les incapacités uniquement, sur les capacités, les capabilités ?).

Pas de révolution de cette offre sans métiers valorisés, sans gouvernance clarifiée, sans qualité défendue, évaluée, sans coopérations tous azimut sur les territoires.
C'est l'objet d'une vraie Loi grand âge tant attendue associée à un vrai 5e risque autonomie de protection sociale. Le rapport Libault début 2019 chiffrait en une dizaine de milliards d'euros l'investissement nécessaire sur plusieurs années. Pour le PLFSS 2021, la ministre de l'Autonomie mobilise 200 millions d'euros pour le domicile notamment. Cela va dans le bon sens bien sûr, mais nous sommes bien loin du compte. Et voici que Brigitte Bourguignon renvoie les départements et les fédérations du domicile à la négociation pour l'agrément de l'avenant 43...

Jusque quand ?

Les professionnels n'en peuvent plus d'attendre. Les citoyens n'ont plus, conscients que ces derniers temps de vie ont besoin de professionnels indispensables pour assurer une présence soutenante, des gestes ajustés, tendres... jusqu'au bout, notamment en cas de crise sanitaire.

La révolution de l'offre du grand âge n'est pas impossible. Elle ne se fera pas sans moyens.

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