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Qualité & management

Orpea : la Caisse des Dépôts va prendre le contrôle du groupe dans la tourmente (dettes, plaintes)

Auteur Annie De Vivie

Temps de lecture 5 min

Date de publication 01/02/2023

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Un an après la déflagration du livre-enquête Les Fossoyeurs de Victor Castanet (prix Albert Londres) qui ressort en librairie, augmenté de 10 chapitres sur les intimidations, les pressions dont sont capables ces acteurs économiques, l'avenir du groupe Orpea, criblé de dettes et sous le coup de nombreuses plaintes, était au cœur des questions au ministre Jean-Christophe Combe la semaine dernière. Il était confiant sur la reprise des négociations avec la Caisse des Dépôts. C'est chose faite ce 1er février après la suspension du cours de bourse : le bras armé de l'état va prendre le contrôle du groupe, à l'issue d'une opération de restructuration de sa dette. Reste à financer le "plan de refondation" lancé par le nouveau DG Laurent Guillot, avec quel modèle économique, quels professionnels sur le terrain ?

Orpea dans la tourmente, l’Etat intraitable et médiateur

Un an après le choc des accusations fondées du livre-enquête les Fossoyeurs, l'ouvrage ressort en librairie aux éditions J'ai lu, en version augmentée des pressions et intimidations dont sont capables ces acteurs économiques pour défendre leurs intérêts.

Orpea a perdu 90 % de sa valeur boursière en un an jusqu'à la suspension de son cours lundi 30 janvier. Le cours de Korian a lui dévissé de 55 %.

Depuis une année, la parole s'est libérée et les plaintes pleuvent contre les groupes privés commerciaux notamment. Orpea est visé par une cinquantaine de plaintes et une condamnation est tombée en juin pour négligence après la mort d'une résidente en 2017.

L'état n'est pas en reste. « Nous avons été intraitables avec Orpea », insistait le ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées Jean-Christophe Combe dans un point presse mardi 24 janvier. Il a exigé la restitution de 55,8 millions d’euros de financements publics considérés comme indûment perçus au regard de l'enquête administrative diligentée contre le groupe. Il a aussi rappelé que 1400 contrôles avaient déjà été réalisés en ciblant les Ehpad privés avec 11 saisines du Procureur de la République pour infractions pénales.

Jean-Christophe Combe a aussi déclaré « espérer » que les discussions entre les créanciers d’Orpea et la CDC menées sous l’égide de la conciliatrice, Maître Hélène Bourbouloux, puissent aboutir pour permettre l’entrée de l’État au capital du groupe.

« J’ai plutôt poussé pour une solution avec la CDC pour avoir un acteur institutionnel de confiance qui rentre dans le capital et prenne le contrôle du groupe, pour qu’on s’assure très clairement de la transformation du groupe dans le sens qu’on souhaite » a dit le ministre à la presse. « L’État fera tout pour s’assurer de la poursuite » d’une façon ou d’une autre des activités du groupe.

Orpea croulait sous une dette colossale de 9,5 milliards d'euros et risquait de manquer de liquidités d'ici à quelques semaines. « Un accord de principe sur un plan de restructuration financière (...) a été trouvé », explique le groupe dans son communiqué.

Il prévoit d'effacer 3,8 milliards d'euros de dette en la convertissant en capital et d'injecter 1,55 milliard d'euros de capital supplémentaire. À l'issue du processus, la CDC détiendra 50,2 % du capital d'Orpea, les créanciers 49,4 % et les actionnaires actuels, s'ils décident de ne pas participer aux augmentations de capital qui leur seront ouvertes, 0,4 %. La CDC et ses alliés (CNP Assurances et les mutuelles Maif et Mascf) vont injecter 1,3 milliard d'euros pour « garantir l’équilibre financier futur du groupe, avec une réduction de près de 60 % de son endettement net », et de financer son plan de refondation lancé en novembre dernier.

Financer le plan de refondation vers quel modèle économique et quels professionnels ? demande Ophélie Meunier de Zone Interdite

« Le plan de refondation ORPEA CHANGE ! vise à mettre en place un modèle d’entreprise éthique, vertueux, et de qualité répondant aux grands enjeux de l’accompagnement de toutes les fragilités et notamment de la dépendance », a commenté dans le communiqué le directeur général d'Orpea, Laurent Guillot.

« Nos grandes priorités sont de faire progresser sans cesse la qualité des soins et de l’accompagnement de nos résidents, de nos patients et leurs familles ; garantir la sécurité et améliorer les conditions de travail de nos collaborateurs ; mettre en œuvre les principes éthiques et de transparence attachés à notre mission. »

Des vœux qui crispent les habitants et les familles ayant déposé plainte contre le groupe autant que Victor Castanet qui pointe la lenteur et les manques de l'Etat pour faire face aux dérives, aux malversations dont ces groupes sont capables. Voir son débat avec le ministre sur France Info le 27 janvier dernier.

Le groupe Orpea était aussi la principale cible de Zone Interdite sur M6 ce dimanche 29 janvier. Les reportages ont mis en lumière des écarts entre les annonces sur les plaquettes commerciales et les manquements graves dans la prise en soin quotidienne (jusqu'à la dénutrition des résidents), des pratiques douteuses sur l'utilisation des fonds publics (l'Apa versée par les départements), des embauches tous azimuts sans les niveaux de diplôme requis, et ce, tant dans les Ehpad que dans les services à domicile du groupe (Domidom) filmés en caméra cachée.

Laurent Guillot a répondu aux questions d'Ophélie Meunier en reconnaissant « le travail fou qu'il avait à faire » au regard de ces pratiques qu'il semblait découvrir.

Qu'êtes-vous venu faire dans cette galère ?
lui a demandé la présentatrice de M6. « Un engagement dans un travail qui a du sens » a répondu le DG d'Orpea. « Il n'y aura pas de rationnement, 35 % de budget restauration en plus en 2023 et 10 % sur les salaires des collaborateurs que nous devons fidéliser », a souligné Laurent Guillot.

Les nouveaux actionnaires du groupe vont néanmoins exiger des résultats économiques : alors comment concilier exigence d'un taux d'occupation élevé avec un taux d'encadrement qui peine à être respecté faute de candidats ?

C'est toute la question.

Mais comme le DG d'Orpea, le ministre Jean-Christophe Combe estime que « la performance économique d'un service médico-social (quel que soit son statut) ne peut aller sans la qualité de l'accompagnement qu'il propose » .

Il n'y a plus qu'à ...

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