Aller sur la navigation Aller au contenu principal Aller sur la recherche

Accompagnements & soins

Vis ma vie : Éric Piolle, le maire de Grenoble, en immersion 3 semaines en Ehpad

Auteur Rédaction

Temps de lecture 3 min

Date de publication 20/03/2024

0 commentaires

Une première. En décembre, le maire écologiste de Grenoble Eric Piolle a effectué un stage de trois semaines en Ehpad, dans le but de « mieux s’imprégner du quotidien des Français ». Il a accepté de revenir sur cette expérience pour agevillagepro.

En tout, l’élu aura passé 125 heures dans un établissement mutualiste de sa région, occupant différents postes, dont celui d’auxiliaire de vie, avec des amplitudes horaires variées. En poste dès 6h30, il a aidé pour les repas, la toilette, le lever… Une expérience dont il tire un nouveau regard.

Pourquoi avoir choisi l’Ehpad pour cette première immersion ?

Eric Piolle : Pour moi, il était important de partager du temps, de reconnaitre le vécu des professionnels, des familles et des résidents, mais aussi de mettre en lumière ces métiers invisibles et profondément humains, au premier plan durant la crise covid mais qui sont retournés dans l’ombre depuis.

Il s’agissait aussi de mieux comprendre les interactions, de trouver de l’énergie, sur le terrain, pour terminer mon mandat.

Enfin, j’ai commencé par l’Ehpad car la solidarité entre les générations va être le grand sujet des prochaines années, à la fois au regard des questions de vieillissement, de dépendances ; mais aussi du changement climatique. Sur cette question, les aînés ont moins d’intérêt à agir que les jeunes générations, mais ils y sont sensibles, et nous avons tous intérêt à agir.

Quel regard portiez-vous sur ces établissements avant cette expérience ?

Eric Piolle : J’ai accompagné mon père, qui a vécu en Ehpad entre 2011 et 2018, puis mon beau-père. Quand on va en Ehpad pour rendre visite à sa famille, on est perturbé par l’odeur qui y règne, le choc émotionnel de voir son proche dans cet état. C’était une expérience à la fois douloureuse et malaisante.

Et maintenant

Eric Piolle : Aujourd’hui, mon regard est très différent, car ma perception est beaucoup plus riche. Dès le premier jour, j’ai pu constater l’attention portée aux résidents, l’engament des professionnels, leur volonté de respecter chacun d’entre eux et de préserver leur autonomie.

J’ai pu voir que la relation aux familles est très diverse, selon qu’elles souhaitent une prise en charge hospitalière pour leur proche, qu’ils souffrent ou non de la situation, qu’ils viennent tous les jours ou jamais…

Qu’est-ce qui vous a frappé dans cette expérience ?

Eric Piolle : Trois semaines, ça laisse le temps de discuter avec les professionnels. Ce qui m’a frappé, c’est le nombre de personnes qui ont choisi ce métier suite à une expérience personnelle avec le monde de la santé, lors de laquelle ils ont été touchés par l’humanité des soignants.

Il y a aussi ceux qui préfèrent travailler en intérim, car ils ne veulent pas endosser la responsabilité de l’amélioration de la qualité, des dysfonctionnements…

Comment vous ont accueilli les professionnels ?

Eric Piolle : J’ai été extrêmement bien accueilli, et je les en remercie beaucoup. J’ai eu un pincement au cœur en les quittant !

S’ils ne m’ont pas reconnu tout de suite, quand je suis arrivé à 6h du matin en blouse le premier jour, l’information a vite circulé. Mais nous étions côte à côte, nous nous sommes tutoyés comme entre n'importe quel collègue, même une fois qu’ils savaient qui j’étais. Je me suis senti un membre à part entière de l’équipe.

Et les résidents ?

Eric Piolle : Certains résidents avaient voté pour moi en 2014 et m’ont reconnu, il y en a même un qui a appelé sa fille pour la prévenir que le maire de Grenoble travaillait à l’Ehpad ! Celle-ci a immédiatement téléphoné à l’établissement, pour les alerter de la dégradation de l’état cognitif de son père !

Quelles vont être les suites de cette expérience ?

Eric Piolle : Le but de cette immersion n’était pas nécessairement d’agir, mais d’en tirer un regard sur l’humanité, d’en tirer de l’énergie pour servir nos concitoyens d’aujourd’hui et de demain.

Ce sont aussi des moments décalés, où je me déporte : le fait d'être sur le terrain oblige à ne penser à rien d'autre, ce qui fait penser, aussi. C’est un cheminement intellectuel nourrissant.

L’immersion permet un partage plus profond, avec une courbe d’apprentissage plus longue, qui se complexifie, se déconstruit, se recomplexifie… En quelques semaines, la perception change.

J’ai pris beaucoup de notes, débriefé chaque jour avec un ami journaliste, mais la maturation est lente. Nous verrons ce qui naît de cette matière.

Propos recueillis par Annie de Vivie & Raphaëlle Murignieux

Partager cet article